jeudi 30 août 2018

Prokoudine-Gorski

Par une curieuse coïncidence, Google célèbre aujourd'hui le 155e anniversaire du Russe Sergueï Prokoudine-Gorski (l'orthographe du nom est francisée).
J'évoquais justement cet inventeur il y a quelques jours, à propos d'un article à paraître.
Rappelons que c'est grâce à son procédé de photographie en couleur que fut réalisé le célèbre cliché suivant:

Portrait pour la crème Tho-Radia.

Et cet autre -largement retouché- en dérivait :


samedi 25 août 2018

Boutures

En 2015-2016, Émilien Adage et Anthony Lenoir créèrent l'association Solarium Tournant. Ce nom leur avait été inspiré par la lecture de notre ouvrage Les Solariums tournants du Dr Jean Saidman (Paris, Glyphe, 2010). Nous eûmes d'ailleurs l'occasion de nous rencontrer à Paris, alors que le projet était encore en gestation.


Anthony Lenoir et Émilien Adage 
présentent notre ouvrage et une de nos contributions 
à l'occasion d'un passage à l'antenne de Radio Aix en septembre 2016.

Depuis ce collectif dynamique, dédié à la "production de résidences et d'expositions pensées autour et à partir des recherches en actinothérapie du Dr Jean Saidman", a su déployer ses activités à Flaine et Aix-les-Bains.

Le vernissage de leur prochaine exposition - baptisée tout simplement "Solarium" - aura lieu le samedi 1er septembre 2018, à 18h, dans le cadre dépaysant de la piscine Pétriaux des anciens thermes nationaux d'Aix-les-Bains. On y découvrira des œuvres de Sarah Feuillas, Laurent Millet et Mengzhi Zheng.
Longue vie à l'association Solarium Tournant !


vendredi 17 août 2018

Des images à foison

Je m'apprête à signer d'ici quelques jours le bon à tirer d'un nouveau numéro de la Revue d'histoire de la pharmacie. On y trouvera, entre autres, deux articles:
- Le premier, co-écrit avec Cécile Raynal, est consacré à l'iconographie de Tho-Radia. Y sont évoqués Alfred Mulvidson, le gérant de la SECOR qui commercialisait la gamme de cosmétiques, Tony Burnand, le publicitaire suisse à l'origine des fameuses campagnes promotionnelles, mais aussi le procédé de photographie en couleur Prokudin-Gorskii et la technique d'héliogravure employée. Nous nous questionnons également sur l'identité de l'égérie blonde, dont le portrait fut reproduit sur bon nombre d'affiches. Plusieurs hypothèses sont formulées.
Ce texte, abondamment illustré (en couleur), fait écho à une communication que nous avons récemment donnée aux premières Jornadas de História da Farmácia e Saúde Pública de l'Université de Coimbra (Portugal).
- Un second article traite des films médicaux tournés en France durant la Première Guerre mondiale. Fruit d'une exploration systématique des fonds cinématographiques de l'Établissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense (ECPAD), ce texte, lui aussi très illustré, vise avant tout à faciliter la tâche des futurs chercheurs et historiens.

Références:
Thierry Lefebvre, "Une exploration des films médicaux tournés durant la Première Guerre mondiale", Revue d'histoire de la pharmacie, n° 399, septembre 2018, p. 351-367.
Thierry Lefebvre, Cécile Raynal, "Autour de l'iconographie de Tho-Radia", Revue d'histoire de la pharmacie, n° 399, septembre 2018, p. 396-412.

jeudi 9 août 2018

Sons d'antan et bons génies

Puisque l'été est propice aux souvenirs et que les nouvelles ne sont pas fraiches, continuons!
Cela se passait il y a près de trente-six ans, le 12 novembre 1982, dans la petite salle du Centre Pompidou dont j'étais depuis quelques années un habitué (je peux même affirmer que je suis un enfant de Beaubourg: merci Monsieur Pompidou!).
Je devais être assis au premier rang. En face de moi, sur une petite estrade, Jean-Claude Carrière (1931), Denise Tual (1906-2000), Ado Kyrou (1923-1985), Antonio Saura (1930-1998), Maurice Drouzy (1923-1998)...
Le débat s'intitulait "À Luis Buñuel" et je viens de retrouver miraculeusement son enregistrement audio dans les rets du web: on peut le réécouter ICI.
Je dois avouer que j'ai toujours beaucoup aimé Buñuel.
Avant ou après le débat (je ne sais plus), je croisais Pierre Guibbert (1942-2004), qui était à l'époque un des piliers de l'Institut Jean Vigo de Perpignan. J'avais fait sa connaissance quelques mois plus tôt, à l'occasion d'une interview amateur (que je viens également de retrouver, preuve que je fais du rangement!) de Marcel Oms (1931-1993), qui présidait à l'époque cet institut dynamique. J'avais également rencontré Hélène Oms et visité, pour la première fois de ma vie, un centre d'archives cinématographiques (photos, affiches, scénarios, bobines de film, etc.).

Quelques semaines passèrent. Le 17 janvier 1983, Pierre Roura, qui était secrétaire de rédaction des Cahiers de la Cinémathèque (la revue mythique de l'Institut Jean Vigo), m'écrivit une lettre que j'ai précieusement conservée: "Est-ce que cela vous intéresserait d'en faire [de ce débat] un compte rendu pour le prochain n° des Cahiers de la Cinémathèque qui sera consacré au cinéma de l'Espagne franquiste?"
Quel honneur, mais quelle inquiétude aussi! Si je griffonnais de manière très régulière depuis mon adolescence, je n'envisageais pas vraiment d'être publié (ou alors dans mes rêves les plus improbables): je ne disposais d'aucune entrée dans ces milieux, mes seules références étaient Martin Eden de Jack London et quelques biographies d'écrivains appréciés... On n'est pas fils d'ouvrier pour rien, comme aimait à me le rappeler fort gentiment mon regretté père.
Bref, je me lançais sans le moindre conseil: j'écrivais, raturais, me dépatouillais, puis tapais un texte de quelques milliers de signes sur une petite machine à écrire Olympia, que j'ai par la suite perdue de vue. Elle était verte, crachoteuse, achetée d'occasion, un peu dans le style de l'engin ci-dessous... (Je parle évidemment d'un temps où les ordinateurs et logiciels de PAO m'étaient inconnus.)

 

Me connaissant cependant, cette affaire n'avait pas dû traîner. Il faut battre le "faire" quand il est chaud...

Plusieurs mois passèrent sans la moindre réponse. "C'est la vie", dus-je me dire, "mon texte était sans doute sans le moindre intérêt". Entre-temps, il m'était arrivé pas mal de petites aventures (entre autres radiophoniques) et bien entendu, ce texte m'était complètement sorti de la tête. Peut-être même avais-je fait le deuil de ma brève vocation de scribouillard...
Un jour cependant (ce devait être en mars 1985, donc deux ans plus tard!), je me rendis avec deux amies au Salon du Livre de Paris, qui se tenait à l'époque au Grand Palais. Nous nous promenions à travers les stands quand soudain, par le plus grand des hasards, je tombai sur un regroupement d'éditeurs (région Languedoc-Roussillon, me semble-t-il) et y découvris le dernier numéro des Cahiers de la Cinémathèque. Je n'y étais pas abonné (je n'étais abonné à rien) et feuilletais donc l'exemplaire par curiosité. Soudain, mes yeux tombèrent sur mon texte signé de mon nom ("Paris rend hommage à Buñuel", Les Cahiers de la Cinémathèque, n° 38-39, hiver 1984, p. 211-213). Mes amies, auxquelles je montrais la "chose", ne comprirent pas très bien les raisons de mon air enjoué.


En fait, faute d'une bonne identification postale, les courriers ne m'arrivaient plus. Et voilà comment mon "élan" vers le peu que j'allais devenir, faillit être brisé... Fragilité de la destinée, bizarrerie des "circonstances de la vie" comme l'écrivait Ramuz. Et la morale de cette histoire: ne jamais se satisfaire de nos velléités, qui sont innombrables et stériles.
Je repense souvent à ce petit bonheur de rien du tout, mais tellement improbable que je lui trouve encore du charme un tiers de siècle plus tard. Et je repense à Marcel et Hélène Oms, si tragiquement disparus en juillet 1993, et à Pierre Guibbert, mort également de manière prématurée: mes bons génies qui ne le surent jamais.

lundi 6 août 2018

Ramuz retrouvé

Les Nuits de France Culture ont rediffusé, il y a deux ou trois semaines, une émission diffusée pour la première fois le 15 septembre 1978. Son titre: "Relecture: Charles-Ferdinand Ramuz".


Et là, miracle! À quarante années de distance, la mémoire et la saveur de cette émission, que j'avais écoutée en son temps (j'étais adolescent), me sont revenues presque immaculées: la voix de Ramuz, enregistrée en 1939 ou 1940; quelques extraits de L'Histoire du soldat (mimodrame que composèrent ensemble Ramuz et Stravinsky); les extraits de ses romans et essais; et même certaines analyses des spécialistes convoqués pour l'occasion. Rémanence étonnante de l'écoute radiophonique.
En réécoutant l'émission, je me suis même souvenu avoir été particulièrement perturbé quand Hubert Juin avait affublé l'écrivain du prénom de Conrad-Ferdinand. J'ai longtemps cherché une explication à ce lapsus étonnant...
Il faut dire que Ramuz était alors (et demeure) un de mes écrivains préférés. À l'époque, je devais avoir déjà lu Aline, La Grande Peur dans la montagne et Si le soleil ne revenait pas. Et sans doute m'étais-je déjà plongé dans son Journal qu'il m'arrive encore aujourd'hui de feuilleter.

Depuis, j'ai beaucoup fréquenté l'œuvre de Ramuz, j'en possède d'ailleurs l'essentiel: Derborence, Découverte du monde, La Beauté sur la Terre, etc. Ou bien encore Farinet ou la Fausse Monnaie et Le Gros Poisson du lac que je relisais encore il y a deux ou trois mois. Œuvre immense et douloureuse d'un auteur profondément inquiet, à la recherche d'un style qui lui fut propre.
Je me suis rendu en pèlerinage à sa maison de Pully dans le canton de Vaud, sur les bords du lac Léman, qui devrait accueillir prochainement un musée consacré à sa vie et son œuvre. J'ai parcouru les terrasses de Lavaux à la recherche des merveilleux points de vue si souvent dépeints dans ses romans tels que le beau et complexe Passage du poète.

Merci en tout cas à Philippe Garbit et à l'équipe des "Nuits de France Culture" pour ce retour aux sources, qui me donne envie de retourner flâner du côté de Chexbres et de Saint-Saphorin!

samedi 4 août 2018

Christian Warolin, un homme remarquable

Henri Bonnemain (1911-2006), Pierre Julien (1921-2007) et Christian Warolin (1921-2018): ces trois grands érudits, rencontrés alors que je n'étais encore qu'un tout jeune homme, eurent sur moi une influence déterminante. En dépit des nombreuses décennies qui nous séparaient, ils me prirent en amitié et m'initièrent aux charmes des sociétés savantes, que la doxa des années quatre-vingts prétendait condamner à l'oubli ou à l'indifférence. Un monde que j'ai appris depuis à apprécier, au point de me pencher longuement sur son histoire et d'y consacrer, par exemple, un ouvrage dont je suis justement en train de corriger les épreuves et dont il sera bientôt question ici.
Aucun de ces trois hommes n'était universitaire et, à bien y réfléchir, tous trois étaient bien plus que cela: animés par la passion de la connaissance, soucieux du bénévolat qui s'avère de mise dans ces milieux, ils explorèrent des domaines négligés par la recherche stipendiée, sans recourir à ces prolégomènes qui masquent parfois l'inanité du propos.

La mort récente de Christian Warolin, le dernier de mes "trois mousquetaires" de l'histoire de la pharmacie, vient refermer un chapitre de mon existence. Que dire de cet homme tout à la fois modeste et exceptionnel, qui soutint en Sorbonne le 3 mai 1994 (il était alors âgé de près de 73 ans!), une thèse d'Histoire intitulée Le Cadre de vie professionnel et familial des apothicaires de Paris au XVIIe siècle? Ce travail était le fruit d'une exploration minutieuse du Minutier central des notaires aux Archives nationales. En 2013, Christian me fit cadeau des trois tomes revus et corrigés de ce travail monumental, réédité par les Éditions Scripta (54730 Gorcy) sous le titre Apothicaires de Paris au XVIIe siècle. Le cadre de vie professionnel et familial.
Cet éternel jeune homme poursuivit ses travaux jusqu'en 2016 (il avait près de 95 ans!), date à laquelle j'éditais ses tout derniers textes consacrés entre autres aux ascendants de Molière et à Simon Vouet, le peintre de Louis XIII. Je souhaite à toutes et à tous une telle longévité et, par-dessus tout, une telle foi sans cesse renouvelée dans la connaissance gratuite et partagée.


Un souvenir parmi tant d'autres... En 2000, je reproduisais dans la Revue d'histoire de la pharmacie (dont j'avais pris la direction en 1997 à la demande amicale d'Henri Bonnemain et Christian Warolin) deux portraits de Charles Lindbergh, dont un dédicacé. La publication de ces deux clichés, pris en mai 1927 après la traversée historique de l'Atlantique, procura une très grande joie à Christian: il faut dire que son père, Simon Warolin, à l'époque photographe professionnel, en était l'auteur!
Merci pour tout, cher Ami !